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La Maraîchine Normande
20 mai 2013

RENÉE BORDEREAU, DITE LANGEVIN

RENÉE BORDEREAU, DITE LANGEVIN

QUATRAINS ADRESSÉS AU ROI
Par Renée Bordereau, dite Langevin
Cavalier Vendéen
En lui présentant ses mémoires.

JE vois enfin mon Roi ; son auguste présence
De vingt ans de travaux m'offre la récompense.
Daigne combler, grand Dieu ! mes voeux et mon espoir,
Puisse-je, en ce palais, dans trente ans le revoir.

La fidèle contrée où j'ai reçu le jour
Vous garantit par moi ses serments, son amour
Il est, dans ce pays qui renaît de sa cendre,
Des coeurs pour vous chérir, des bras pour vous défendre

(Par Paul Vallon - Notaire royale à St-Dié-sur-Loir)

 

Renée Bordereau 4

"JE suis née dans le village de Soulaine, près d'Angers, en juin 1770, de parents pauvres, mais honnêtes.
L'insurrection des royalistes de la Vendée, en 1793, attira dans notre pays des armées de républicains qui ravageaient et massacraient sans miséricorde. Je vis périr quarante-deux de mes parents successivement ; mais le meurtre de mon père, commis sous mes yeux, me transporta de rage et de désespoir. Dès ce moment, je pris la résolution de sacrifier mon corps au Roi, d'offrir mon âme à Dieu, et je jurai de me battre jusqu'à la mort ou la victoire.
J'achetai d'abord un fusil à deux coups, avec lequel je tirai au moins vingt-cinq fois dans un blanc, pour m'apprendre à ajuster, et dès que je vis que je ne manquais presque pas un coup, je me procurai des habits d'homme ; je me réunis à cinq cents hommes de ma paroisse, avec M. Coeur-de-Roi, que nous avons nommé commandant.
Je pris le nom de mon frère Hyacinthe ; mais comme mes camarades ne s'en rappelaient pas bien, ils me donnèrent le nom de Langevin, que j'ai toujours gardé." (Mémoires de Renée Bordereau dite Langevin - septembre 1814)

... Pendant six ans de combats incessants son ardeur ne s'est pas démentie. Elle fit payer cher aux Bleus l'assassinat de son père.

La veille de la bataille du Pont-Barré, elle surprend un détachement d'avant-garde et tue quatre patriotes de sa main ; détail horrible, un de ces misérables avait un enfant de six mois enfilé avec deux poulets au bout de sa baïonnette. Son intrépidité à ramener au milieu des balles les paysans pris de terreur fut une des causes de cette victoire. Elle s'acharna à la poursuite des Bleus : elle voyait chez chacun d'eux un assassin de son père. Après avoir franchi le Layon avec trois cents hommes résolus, elle prend les Bleus en flanc, sabrant à droite et à gauche, fait mordre la poussière à vingt et un soldats depuis les coteaux de Rablay jusqu'à l'entrée des Ponts-de-Cé : son sabre s'étant cassé sur la tête du dernier dans les rues du Pont-de-Cé, l'énergique jeune fille cesse la poursuite et rejoint tranquillement le gros de l'armée.

BeFunky_4Underpainting_1Renée Bordereau passa la Loire sur son cheval ; dans cette lamentable épopée, elle voulut toujours marcher à l'avant-garde.

A Candé, elle lutte corps à corps successivement avec deux fantassins et un hussard, les tue et vend le cheval du cavalier pour 300 fr. ; elle en donne aussitôt le prix à M. Mouchette de Chemillé qui se trouvait sans argent.

A Laval, elle fait prisonnier un commissaire républicain et lui sauve la vie, reconnaissant qu'il a caché chez lui quatre prêtres insermentés.

Au combat de La Croix-Bataille, à deux pas de Laval, elle est avec les Vendéens qui prennent des cartouches dans les caissons des Bleus.

Le lendemain du jour où elle fut blessée d'un coup de sabre au bras droit, Stofflet l'apercevant, le bras en écharpe, à la tête de ses cavaliers, veut la faire retirer ; sur son refus, Stofflet la menace du plat de son sabre. "Général, lui crie M. Morna d'Angers, c'est un de vos meilleurs cavaliers, il veut mourir à l'avant-garde, c'est son dernier mot ! Est-ce donc un gentilhomme ? repart Stofflet." Morna confia au général le secret de Langevin : depuis lors Stofflet eut les plus grands égards pour cette héroïque jeune fille.

La paix venait d'être signée à la Jaunais ; Renée se cacha néanmoins au moulin des Briffetières, paroisse de Sainte-Christine, sachant qu'elle n'avait rien de bon à attendre des patriotes. Vendue par un traître, une brigade de gendarmerie conduite par Cholet de la Poitevinière arrive en vue du moulin ; elle n'a que le temps de prendre des habits de femme. Cholet lui demande où est Langevin : "Je le reconnaîtrais bien ce brigand-là, si je le voyais. - Je crois qu'il est ici, dit Renée, chezchez-le", et, tout en aidant les Bleus à défaire son lit, elle dissimule avec les couvertures son sabre, son fusil, sa schabraque, en mettant le pied dessus. On veut lui voler son cheval. "Il est à mon maître ! - On va te le laisser, si tu nous dis où est Langevin. - Qu'en voulez-vous faire, puisque la paix est faite. - La paix n'est pas pour lui ; nous avons ordre de le couper en morceaux partout où nous le trouverons." Les gendarmes prirent les noms des habitants du moulin, et, sans la reconnaître, l'obligèrent à les accompagner à Chemillé, pour y recevoir du maire un certificat de sûreté. Elle demeura pendant deux ans à Chemillé ; elle put lire les affiches qui mettaient sa tête à prix ; elle était côtée à 40,000 fr. ; le maire Pataud de la Poitevinière, Ardré, offrait, en outre, une prime de 10,000 fr. à qui la livrerait.

En 1799, Renée reprit les armes et cessa de combattre après le traité de paix signé par d'Autichamp.

Renée Bordereau a écrit ses mémoires en 1814. Elle y raconte les souffrances que ses cruels geôliers lui firent subit dans les prisons et dans l'asile des aliénés à Angers, au Mont-Saint-Michel surtout. Ses lâches persécuteurs poursuivaient chez cette femme le mal qu'elle avait fait à la République. Si l'histoire flétrit leur infâmie, elle admirera toujours la bravoure et la fidélité de la vaillante Renée Bordereau.

Paysans Vendéens
Biographies, silhouettes & faits d'armes
Abbeville - C. Paillart, Imprimeur-Editeur - 1892
Bibliothèque du comte de Chabot
Archives Départementales de Vendée

acte de naissance Renée Bordereau

Renée Bordereau naquit à Soulaines-sur-Aubance le 4 juin 1766, fille de Julien et de Renée Triballe.

Renée Bordereau 3L'exaspération provoquée par le massacre de la plupart des membres de sa famille et de son père, qui fut blessé à la tête sous ses yeux, dans sa propre maison, et envoyé en juillet an II dans la prison d'Angers, d'où il fut conduit à Saumur et mourut de ses blessures (lettre du général Moulin au général Duhoux) la jeta dans l'armée vendéenne, où elle fut bientôt célèbre par son intrépidité et sa férocité. Déguisée en homme, connue sous le nom de Langevin, elle prit part à la plupart des combats. "Elle marche à la tête des brigands" écrivait le général Moulin dans le même lettre. Elle fut blessée au moins trois fois, à la jambe droite à l'affaire de Montigny, d'un coup de sabre au bras droit à l'affaire de Laval, d'une balle au-dessus de l'oeil gauche à l'affaire de Luçon. Mme de La Rochejaquelein, qui affirme qu'elle tua 19 hommes de sa main, la vit un jour à Cholet. Elle était d'une taille ordinaire et fort laide. "Remarquez, lui dit-on, ce soldat qui a des manches d'une autre couleur que sa veste. C'est une fille qui se bat comme un lion." L'apaisement religieux ne la calma pas. Celle-là était vraiment une fanatique qui se battait par esprit de vengeance, contre la République pour le retour du roi : le 5 thermidor an VII, à une heure de l'après-midi, le maire de Thouarcé écrit au Département qu'une horde de brigands, armés de fusils et fourches, commandée par la nommée Bordereau, s'est portée vers les six heures du matin au village de Mâchelles et au bourg de Faveraye, y ont coupé les arbres de la Liberté en criant "Vive le Roi" et se sont portés dans diverses maisons qu'ils ont pillées, entre autres celle du citoyen Jacques Basantay, à qui ils ont pris une montre et des boucles d'argent ; chez l'adjoint, chez la veuve du percepteur, chez le citoyen Mercier, adjudant général de ce canton, où ils ont commis tous les excès possibles et enlevé les meilleurs effets. Les patriotes de Thouarcé se réunissent au son du tocsin et en arrivant à Faveraye y trouvent déjà ceux de Martigné ; on se met à leur poursuite ; un des brigands est abattu d'un coup de sabre par le jeune Gélineau de Vihiers ; le rassemblement était de 60 à 70 dont beaucoup de jeunesse.

Sous l'Empire, Renée Bordereau continua à s'agiter ; elle s'était, vers 1806, installée comme bouchère à Cholet. Mais en même temps, elle excitait les Vendéens contre le Gouvernement. Elle finit par être arrêtée et expédiée à Angers aux Pénitentes. Dans un rapport sur les femmes détenues (septembre 1809), il est dit qu'elle a été incarcérée depuis cinq mois "soupçonnée de protéger la rébellion et d'avoir parcouru plusieurs communes pour engager les conscrits à se joindre aux brigands, croyant que l'instant favorable était arrivé. Sa maison, ajoute le rapport, est à l'abandon depuis qu'elle est incarcérée, n'ayant personne pour y veiller."
Dans une note marginale, l'on a ajouté : "Femme dangereuse et féroce qu'il est important de séquestrer de la société". Une lettre du 4 septembre 1810 dit qu'elle a été arrêté dans le bourg de St-Lézin, dans les premiers jours de mai 1809, au moment où elle embauchait pour les bandes et annonçait la guerre civile prochaine. Elle fut expédiée au Mont-Saint-Michel, où elle demeura jusqu'à la première Restauration. Dès le 24 décembre 1814, elle présenta au roi une supplique où elle exposait tout ce qu'elle avait accompli et souffert pour sa cause et demandait une pension. Le placet était apostillé des généraux de Sapinaud, Danyaud du Perat, de Vallois. En même temps, elle publiait ses Mémoires (64 pages in-8°). Louis XVIII accorda des secours à l'amazone vendéenne qui reprit naturellement le combat au moment des Cents jours. Le maréchal Davoust écrit à Fouché : "On dit qu'une femme nommée Langevin qui a figuré par ses atrocités dans la guerre de Vendée et qui a été présentée à l'ancienne Cour, a quitté le pays dans l'intention de se rendre à Paris et d'attenter aux jours de Sa Majesté l'Empereur.
Si elle s'est rendue à Paris, elle ne peut y être qu'avec de mauvaises intentions. La police fera sagement de s'en assurer."

Renée Bordereau 2La chute de Napoléon ramena la paix dans le coeur de Renée Bordereau. Mme de La Rochejaquelein la présenta au prince de Condé : Langevin lui sauta peu protocolairement au cou. Le prince lui rendit son baiser ... La même Mme de La Rochejaquelein affirme que Renée Bordereau continua à préférer le costume masculin aux habillements féminins. Elle en avait pris l'habitude. Elle reçut de l'argent du roi, des princes, mais fut dépouillée par une personne en qui elle aurait mal placé sa confiance. Elle mourut d'une longue et douloureusement maladie patiemment supportée, le 21 juillet 1822, à l'âge de 56 ans. Elle séjournait tantôt à Paris, tantôt en Anjou. Ses Mémoires ont été publiés à nouveau en 1888 (Niort, Favre), sans autre préface que celle qui figure en tête de l'édition de 1814.

Dictionnaire de Maine-et-Loire
Archives Départementales de Maine-et-Loire


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Commentaires
P
bonjour, j'ai une question qui concerne Céleste Bulkeley, qu'est elle devenue après la mort de Charette? Était-elle avec lui avant d'être arrété?<br /> <br /> Si Renée Bordereau était recherchée dans toute la vendée alors qu'elle n'était qu'une simple brigande, l'irlandaise, elle qui était à la tête de nombreux soldats n'a pas put s'en sortir comme ça sans ne payer un prix?
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La Maraîchine Normande
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