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La Maraîchine Normande
13 mai 2013

LA COPECHAGNIERE ♣ LA NUIT ET LE RETOUR DE NOCES DU CHIRURGIEN BUET

 

Capture plein écran 13052013 210331En 1793, il y avait à la Copechagnière deux médecins, ou plutôt, comme on disait alors, deux chirurgiens, MM. Buet, père et fils. Fervents catholiques l'un et l'autre, il va sans dire qu'ils embrassèrent la cause de l'insurrection ; mais le père, d'un âge avancé, ne figura dans le mouvement qu'à rais¤n de simple conseiller. Quand au fils, son rôle devait être de plus en plus actif.

Au début, toutefois, comme il ne s'agissait, dans ce coin de la Vendée, que de simples courses tantôt du côté du camp de l'Oie, tantôt du côté de celui de la Roche-sur-Yon, et que la présence du jeune chirurgien était plus utile au bourg de la Copechagnière, les insurgés de la paroisse l'exemptèrent de toute marche et, à cet effet, passèrent avec lui une curieuse convention dont voici le texte authentique, d'après l'original pieusement conservé par un membre de la famille Buet :

"Je promets secours à tous les gens de la Copechagnière qui me requéreroient à cet effet, et gratis pro Deo à tous ceux qui reviendroient malades soit par le mauvais temps, fatigué et aux pauvres malheureux blessés qui reviendroient à leur gîte, sous les conditions que je ne serai pas contraint à la marche où ils sont assujetti.
A la Coupechainière, ce 29 mars 1793.
BUET, fils, chi. royal.

Nous habitans de la ditte paroisse de la Coupechaignière acceptons l'offre faite par le dit M. Buet et promettons de le pas ainquette à cette effet.
Le 29 mars 1793.
REZEAU ; Pierre COUILLAUD ; Jean MOREAU ; Jacques MIGNET ; CH. MOREAU ; Jacques BREVET ; Marie MOREAU ; J. BATY ; Pierre BARRANGÉ ; Alexandre MOREAU ; Pierre CHAPLEAU."

La convention ainsi libellée fut observée pendant plusieurs mois, vraisemblablement jusqu'à la réunion des volontaires de la Copechagnière à l'armée de Charette. Le chirurgien Buet fut alors attaché à l'état-major du général bas-poitevin et suivit celui-ci sur tous les champs de bataille. Charette affectionnait beaucoup s¤n chirurgien et l'appelait familièrement "le petit Buet".

Entre temps notre jeune homme s'était marié, aux Brouzils, avec la pupille du général et le mariage, comme on va le voir, avait été des plus mouvementés.

C'était au plus fort de la guerre, mais alors que Charette régnait encore à peu près en maître dans le pays, où les troupes républicaines ne faisaient que passer en courant. Bien entendu le général assistait à la cérémonie, ainsi qu'aux deux repas de noce qui suivirent.

Le matin, cela se passa tranquillement ; mais voilà que tout à coup, vers la fin du repas du soir, alors qu'on était au plus fort des chansons et qu'on se préparait à la traditionnelle danse du gâteau, arrive précipitamment un homme essoufflé qui s'écrie : "Sauvez-vous ! ... voilà les Bleus !"

C'était une colonne républicaine qui, arrivant du côté de l'Herbergement, se trouvait déjà rendue entre le village de la Tébline et celui de la Coussaie, à une toute petite distance du bourg des Brouzils.

On juge de l'effarement des convives ! ...

La plupart avaient quelque peu bu, comme cela arrive toujours dans les noces vendéennes, et sauf le général et quelques braves, qui sautèrent sur leurs armes et coururent au-devant des Bleus, tout le monde s'enfuit, dans le plus grand désordre, vers la forêt de Grasla, refuge ordinaire en cas d'alerte.

Le marié avait bravement suivi Charette et quand, au retour du combat, il gagna lui-même la forêt, ce fut en vain qu'il y chercha sa femme, qui elle-même le réclamait à tous les échos. Les deux époux ne se retrouvèrent que le lendemain, après avoir passé leur nuit de noce ... à se chercher vainement au milieu des fourrés ! ...

Au mois de mars 1795, profitant de la courte accalmie qui suivit la pacification de la Jaunaye, la belle-mère du jeune chirurgien voulut fêter la paix en donnant un retour de noces. C'était doublement de circonstance, après un mariage si dramatique et la lune de miel - non moins mouvementée - qui avait suivi ...

Charette fut invité à cette fête de famille, mais il ne put y assister et s'excusa par la lettre que voici :

"A Belleville, ce 14 mars.
Madame,
Daignez agréer mes sincères remerciements de votre souvenir qui me sera toujours flatteur, il m'est impossible de répondre physiquement à votre invitation, mes occupations m'imposent cette privation. Je vous prie de dire de ma part à votre aimable société mille choses honnêtes et assurer Dargent de la part que je prends à son indisposition et des voeux que je fais au ciel pour son prompt rétablissement.
Je suis avec respect, Madame, votre très humble et obéissant serviteur.
Le Chr CHARETTE"

Aucun incident, cette fois, ne vint troubler la fête ; les invités purent festoyer en paix et l'un d'eux, poète à ses heures, fit beaucoup rire la compagnie en chantant quelques couplets où était rappelée la fameuse nuit de noces de la forêt de Grasla.

Comme tous les mariages qui n'avaient été contractés que religieusement pendant la guerre, celui du chirurgien de Charette dut être régularisé devant l'officier de l'état-civil, lors de la pacification. A cette époque trois enfants étaient déjà nés, - ce qui prouve que, tout en courant les champs de bataille, le jeune marié n'avait point négligé ses devoirs d'époux chrétien.

Il ne les négligea pas davantage à l'avenir, car ce mariage si dramatiquement commencé fut des plus prospères : il en naquit huit enfants, quatre garçons et quatre filles. Deux de celles-ci prirent le voile des Religieuses de Mormaison, et l'aînée, qui avait été l'une des fondatrices de l'Ordre, en devint plus tard la supérieure générale. Le plus jeune et dernier survivant, M. Samuel Buet, notaire à la Roche-sur-Yon, est décédé dans cette ville en 1888. Deux autres des enfants, médecins comme leur père, s'établirent, le premier aux Brouzils, le second à Mareuil, où un arrière-petit-fils exerce encore la profession de l'aïeul qui, en 1793, soignait gratis pro Deo les gâs de la Copechagnière.

La Vendée Historique
Décembre 1907

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Commentaires
S
Hélas, je n'ai aucune source à vous signaler concernant ce texte que j'ai trouvé dans la revue La Vendée Historique de décembre 1907.
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R
Merci pour cet article passionnant. en tant que descendant direct du chirurgien Nicolas Marie je suis très intéressé par son histoire. Auriez-vous la source de ces informations? La lettre de Charette qui annonce qu'il ne pourra se rendre au retour des noces en 1795 est consultable dans des archives?
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La Maraîchine Normande
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