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La Maraîchine Normande
21 février 2013

TROUBLES RELIGIEUX DANS LE PUY-DE-DOME

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"Le clergé d'Auvergne, dit Boudet, ne se met pas en avant, mais on ne peut pas lui demander de baiser la main qui persécute l'Eglise toute entière ; ses prédications sont écoutées avidement dans les granges des hameaux par les populations irritées. Les curés intrus étaient l'objet du mépris ..." Il n'y eut pas de place dans notre province pour la religion nouvelle. Les pièces, les procès-verbaux du temps sont pleins d'actes d'hostilité dirigés contre les prêtres jureurs ; leurs églises étaient délaissées ; eux-mêmes honnis, conspués.

Le curé de Saulzet-le-Froid (l'intrus) demande son rappel ; celui de Saint-Sandoux reconnaît que tout le monde est contre lui, même la municipalité ; à Saint-Georges-de-Mons, une troupe de gens des villages se groupent en armes autour de M. Périgau et de Rocheneuve pour protéger leur ancien curé qui s'est réfugié chez Madame de Forget, au château de Gourdon. Peu de communes du district d'Ambert furent exemptes de troubles ; l'autorité départementale dut employer la troupe dans les communes de Brousse, Montboissier, la Chapelle-Agnon, Job, Vic-le-Comte, Saint-Julien-de-Cappel, Saint-Gervais. A Romagnat, l'insurrection, motivée sur la violence faite au culte, fut sérieuse ; à Issoire, à Thiers, à Riom, il y eut aussi du tumulte ..."

Voici ce qu'écrivait, dans un journal, sur la manière dont étaient traités les intrus dans les paroisses du Puy-de-Dôme, un révolutionnaire bien connu, le citoyen Gauthier Biauzat, député de Clermont :
"Presque toutes les communes d'Auvergne ont été le théâtre de grandes fermentations ... A Sauxillanges, plusieurs coups de feu sur l'officier en écharpe ; à Artonne un étui monstre, plein de gros poux semés dans la chaire à prêcher, dix minutes avant la prédication, et une poule crevée attachée pendant la nuit à la porte du prédicateur ; à Saint-Germain, un lieutenant patriote arrêté et percé de coups ; à Thuret une trappe remplie d'immondices où le pasteur en se promenant entra jusqu'aux genoux ; à Plauzat, une insurrection violente contre les acquéreurs des biens nationaux ; à Beaumont, massacre de quelques patriotes ; à la Sauvetat, ministre des autels arraché de son église par les cheveux ; à Champeix, une nouvelle Théot qui a soulevé le peuple contre un citoyen paisible ; à Neschers, l'arbre de la liberté gisant à terre ; à Clermont, une horde de fanatiques qui bousculent et sabrent les républicains ; à Riom, ces mêmes hommes envahissent la ville et sont maîtres de tout ; à Saint-Sandoux on veut pendre le curé ; à Saint-Georges-de-Mons, on veut l'empaler ..."

Dans la séance de l'Assemblée Législative du 7 octobre 1791, Couthon, député de Clermont, s'écriait :
"Nous sommes envoyés ici pour amener le calme et nous ne pourrons jamais y parvenir si nous ne prenons des mesures vigoureuses contre les prêtres réfractaires. Il y a dans la campagne des curés qui restent dans leurs paroisses, quoiqu'ils soient remplacés et font du mal par leur seule présence. Cela est très sérieux. Il y a des endroits où les prêtres constitutionnels ont été poursuivis à coups de bâtons pendant le jour et à coups de fusil pendant la nuit. Les prêtres réfractaires continuent leurs fonctions ; ils disent la messe, confessent, font l'eau bénite dans leurs maisons. Il est impossible d'acquérir des preuves contre eux ; ils n'ont pour témoins que leurs partisans. Je vais vous citer un fait dont je suis certain : Un prêtre constitutionnel est entré dans l'endroit où un prêtre réfractaire disait la messe. Le réfractaire s'est déshabillé au milieu de la messe et s'est enfui en criant : Cette église est polluée ! J'insiste pour que nous méditions sérieusement sur les mesures qu'exigent les circonstances."

Plus tard le même Couthon écrivait, le 31 mars 1792, de Paris à Clermont : "Messieurs et chers concitoyens, j'apprends avec bien de la peine que la paix a été troublée dans quelques endroits de notre département ; que de reproches ont à se faire les hypocrites de toutes les espèces qui, sous le masque de religion, disposent le peuple de bonne foi à des excès d'indignation ou d'erreur ..."

"Il existait en 1789, à Vollore, une congrégation de prêtres communalistes qui jouissaient dans le pays de la sympathie générale. Il y avait aussi, à douze kilomètres environ de Vollore, sur les limites de l'Auvergne et du Forez, un couvent appelé l'Hermitage qui servait de maison de retraite à un certain nombre de missionnaires du diocèse. Missionnaires et communalistes avaient refusé le serment exigé par les lois nouvelles et cependant étaient restés dans le pays.
Ils avait été rejoints, depuis la fermeture des couvents, par un certain nombre de religieux originaires du District. Tous ces prêtres exerçaient leurs fonctions ecclésiastiques en parfaite sécurité et avec l'assentiment à peu près unanime des habitants. Aussi les prêtres assermentés étaient-ils généralement honnis et méprisés. on évitait d'assister aux offices célébrés par eux ; on refusait de leur porter les enfants nouveaux-nés, on ne leur faisait bénir aucun mariage. De plus, on les insultait et on les maltraitait. Ainsi, le 16 décembre 1792, le curé constitutionnel de Vollore-Montagne ne put arriver à se faire installer ; on l'empêcha d'entrer dans l'église et il fut suivi à coups de pierres.

A Vollore-Ville, l'arbre de la liberté fut coupé, le bonnet phrygien, dont il était décoré, fut lacéré et brûlé, et on cribla de coups de fusil la porte de la maison où habitait le curé constitutionnel.

L'administration du District pour prévenir le retour de pareilles scènes, ordonna par une arrêté du 5 janvier 1793, l'expulsion de quatorze prêtres insermentés dont la présence lui avait été signalée."

A Ambert, "les intrus qui desservaient la paroisse ne pouvaient jouir d'aucune considération auprès d'un peuple épouvanté et profondément chrétien. Aussi la foi se tenait captive et silencieuse dans les consciences et le temple était presque désert."

A Valbeleix, dans le même département, "la présence de l'intrus Bernard ne provoqua guère que le mépris. Chansonné et raillé partout, Bernard demeura sans influence. On raconte encore des traits de sa ridicule jactance et plus d'un couplet satirique à son endroit se redit même aujourd'hui."

A Brioude, les catholiques poursuivaient de leur mépris les jureurs et ceux-ci, furieux, les dénonçaient à l'Assemblée nationale, se plaignant qu'elle n'avait pas assez de rigueurs contre les catholiques. Ils écrivaient à Toidel, président du Comité des recherches : "Vous aboyez, vous jappez toujours contre l'Eglise et vous ne mordez jamais".

Ils ajoutent qu'il faut agir avec une plus grande rigueur contre ceux qui les traitent de schismatiques et d'apostats.
"Il faut, disent-ils, un décret nouveau ou pour nous décharger de nos serments ou pour assermenter ceux qui l'ont refusé, sans cela, le mépris qu'on nous témoigne nous ferait quitter l'Eglise constitutionnelle."

A Vic-le-Comte, Guillaume Thourein, curé de la paroisse ayant refusé le serment, est remplacé par l'assermenté Duniat.

"L'abbé Montaigne, l'abbé Arnaud et le chanoine Fouilloux, prêtres non conformistes (qui n'avaient pas prêté le serment) entrent alors en scène ; à leur instigation, filles et femmes refusent de se confesser au curé constitutionnel ; celles qui sont soupçonnées de le faire reçoivent le surnom de Mirabaudes. Tantôt les servantes de l'ancien curé insultent l'abbé Duniat et propagent le bruit que les sacrements n'ont pas de valeur lorsqu'ils sont administrés par les constitutionnels, tantôt les dévotes renversent l'eau bénite et refusent de faire baptiser leurs enfants par l'intrus. Il résulte des procès-verbaux et des arrêts du tribunal que nombre d'enfants ne recoivent pas le baptême. En cachette et de grand matin, les femmes viennent faire leurs relevailles devant les prêtres non conformistes.
La dissension s'établit dans les ménages. Bien des épouses ne croient pas à la validité de leur mariage.

Malgré la surveillance des gardes nationales et des soldats du 21e de ligne, il se produit des émeutes, organisées par certains prêtres.

Jean Maret, dit Laigara, enlève l'image de la Vierge placée dans une chapelle derrière le maître-autel pour ne point la voir souillée par la présence des mauvais prêtres. Les cinquante homme du 21e de ligne sont remplacés par des soldats du 67e ; ces derniers ne réussissent qu'avec peine à rétablir l'ordre ... Le curé Thourien meurt le 27 février 1792. Ses funérailles sont le sujet de troubles qui menacent de devenir très sérieux. Les autorités municipales interviennent pour exhumer le corps et montrer au peuple que le cercueil ne renferme pas un chien comme il se l'imagine. Elles somment d'ailleurs l'autorité ecclésiastique de procéder régulièrement à de nouvelles funérailles et d'enterrer le mort dans le cimetière de la paroisse avec les cérémonies ordinaires".

Capture plein écran 21022013 182759A Saint-Sandoux, non loin de Vic-le-Comte, même répulsion pour le curé constitutionnel. En 1789, Léger de la Rochette était curé de la paroisse, Martin Roucheix, vicaire, tous les deux confesseurs de la foi, ainsi qu'un prêtre communaliste, Didier Gauthier, qui persistant à refuser le serment et à exercer le culte catholique à Saint-Sandoux, fut arrêté et transporté à Bordeaux où il mourut à l'hôpital Saint-André en 1794, à l'âge de 53 ans.
Ces trois prêtres tinrent tête au schisme avec une fermeté admirable, mais ils durent enfin céder à la force et se retirer devant la violence de la persécution.
L'intrus fut installé le 12 juin 1791. Voici le procès-verbal de cette cérémonie :
"Aujourd'hui dimanche, à 10 heures du matin, devant la municipalité, est comparu M. Pierre Verdier, muni de sa nomination à la cure de ce lieu dudit Saint-Sandoux, faite par Messieurs de l'assemblée électorale du District, le 24 mai dernier ; du visa de M. Périer, évêque du diocèse de Clermont du 4 courant ; nous ayant remis les dites pièces, l'avons conduit avec la garde nationale commandée par Claude Tourre, fils à Pierre, capitaine, l'avons introduit dans l'église, où étant, avons fait lecture à haute et intelligible voix de la dite nomination et visa en présence de la garde et des fidèles ; à l'instant le dit sieur Verdier, étant monté en chaire, a prêté en nos mains le serment civique par lequel il a juré de veiller avec soin sur les fidèles qui lui sont confiés, d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi et de maintenir de tout son pouvoir la Constitution décrétée par l'Assemblée nationale et acceptée par le roi ; en conséquence, avons proclamé le dit sieur Verdier curé de notre paroisse et l'en mettons en possession, ainsi que de tous droits y attachés ; enjoignons à tous en général et à chacun en particulier de le reconnaître pour tel. De suite le dit sieur Verdier est entré avec nous dans la sacristie, s'est revêtu des habits sacerdotaux et de l'étole, et, conduit par le sieur Pierre Ferdinant Goignet, prêtre, ci-devant carme, a célébré la grand'messe de paroisse chantée par le dit Goignet, en présence de la garde nationale et d'un grand nombre de fidèles."

C'est ainsi qu'étaient installés tous les curés constitutionnels ; l'Eglise n'y prenait point part et seule l'autorité civile s'attribuait cette fonction usurpée.
Les paroissiens de Saint-Sandoux, à part une faible minorité, ne voulurent jamais entrer en communion avec l'intrus et continuèrent, tant qu'ils eurent le bonheur de les posséder, à demander les sacrements à leurs légitimes pasteurs et à leur témoigner leur sincère dévouement.
Le malheureux intrus se voyant abandonné, osa, dans sa déconvenue, s'en prendre aux prêtres catholiques et ne craignit pas de pousser la municipalité à des mesures tracassières contre eux, surtout contre le vénérable abbé Gauthier qui s'obstinait à rester dans la paroisse.

Pour forcer les fidèles à entendre la messe du schismatique, le maire ordonna la fermeture des auberges pendant les offices, mais rien n'y fit et le vide s'étant fait peu à peu près absolu, autour de l'intrus, celui-ci s'en alla chercher un domicile à Clermont."

Capture plein écran 21022013 182512A la Sauvetat mêmes désordres :
"Comme partout, à cette triste époque, on vit surgir, dans cette paroisse, quelques hommes qui en furent les fléaux et dont le sinistre souvenir est encore vivant de nos jours. Lacquit, dit le Grenadier, le Vert et Paulet, d'Autheyat, se signalèrent parmi les plus fougueux et les plus cyniques. Au commencement de l'année 1791, ils avaient reçu avec joie un prêtre assermenté, l'abbé Victor Duclos, originaire d'Emezat, et tentèrent vainement d'imposer à la population ce ministre égaré. Mais leurs violences et leurs vexations ne firent qu'augmenter l'amour et l'attachement des fidèles pour la religion de leurs pères et pour le légitime pasteur, l'abbé Bletterie, curé depuis 1783. Ne parvenant à éloigner ce dernier ni par les menaces, ni par la calomnie, ils l'arrêtèrent plusieurs fois et toujours ils le remettaient en liberté. Cependant l'exaspération allait croissant contre le schismatique Duclos. Un jour même les femmes de la Sauvetat faillirent le lapider et le laissèrent pour mort. Plus tard on lui fait remplir les fonctions de conseiller municipal et d'officier public, depuis 1793 jusqu'en novembre 1796, époque où il quitta cette paroisse".

Histoire de la révolution en Auvergne
Tome 7

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