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La Maraîchine Normande
8 octobre 2012

LE SYNODE DU POIRÉ-SUR-VIE ♣ 4 AOUT 1795

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Après avoir subi une détention de trois mois à Fontenay, en 1792, l'abbé Jean Brumauld de Beauregard, chanoine et vicaire général de Luçon, plus tard évêque d'Orléans, dut s'éloigner de ce diocèse et se réfugia dans les environs de Poitiers. Il y fut découvert au mois de janvier 1793, et mis en demeure de se reconstituer prisonnier ou de se déporter en Angleterre. Il opta pour ce dernier parti, espérant qu'il pourrait trouver de là, l'occasion de revenir exercer son zèle dans sa patrie.

Cette occasion se présenta au moment où fut décidée l'expédition de Quiberon. Au mois d'avril 1795, l'abbé de Beauregard fut chargé de porter à Charette, les instructions des chefs du parti royaliste et celles du premier ministre Pitt. Ce dernier attachait tant d'importance aux siennes, qu'il se rendit lui-même au bureau de la diligence, pour ne les remettre à son envoyé qu'au moment du départ et qu'il ne remonta en voiture qu'après avoir vu partir la malle.

Ce ne fut qu'après de longues et périlleuses péripéties, que l'abbé de Beauregard arriva, le 11 juillet 1795, à Belleville, quartier général de Charette. Ce dernier aurait voulu le retenir près de lui, mais l'abbé de Beauregard ne pouvait accepter cette proposition. "J'abjure maintenant, lui dit-il, la qualité d'envoyé politique. Je veux désormais prêcher l'Evangile sans prendre part aux affaires publiques. J'ai des ordonnances de mon évêque ; je les ferai connaître au clergé, et j'administrerai le diocèse avec l'abbé de Charette de la Colinière, votre cousin."

Mgr de Mercy, évêque de Luçon, avait pu sortir de Paris la surveille des massacres de Septembre ; il s'était réfugié en Suisse. Les premiers succès de l'insurrection de Vendée lui ayant fait espérer la fin prochaine de la révolution, il avait envoyé de Mindrizio, le 1er janvier 1794, une Instruction pastorale destinée à tracer des règles de conduite, et le 1er juin de la même année, une Lettre pastorale de Mgr l'évêque de Luçon à son clergé fidèle, pour le disposer à reprendre avec fruit, après le schisme, les fonctions du saint ministère.

Il avait écrit, le 11 juin 1794, à l'abbé de Beauregard, alors en Angleterre : "J'ai su tout ce que votre zèle apostolique vous a fait entreprendre : Je n'en ai point été surpris, j'y ai applaudi, j'en ai remercié Dieu et je ne cesse de lui demander de répandre sur vous et sur vos travaux apostoliques, ses plus abondantes bénédictions. Vous paraissez dans l'ordre de la Providence, devoir être mon prédécesseur dans mon diocèse ... Vous vous approcherez le plus que vous pourrez de mes intentions ; mais je ne trouverai pas mauvais qu'on s'en écarte quand la nécessité ou un plus grand bien l'exigeront."

Il lui écrivait encore de Ravenne : "Vous avez vu que je vous laisse la plénitude de mes pouvoirs pour gouverner et décider de tout, provisoirement, dans ce que je n'aurai pas prévu, et dans les changements que les circonstances peuvent apporter même dans ce que j'ai voulu prévoir."

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Telle était la mission et tels étaient les pouvoirs de l'abbé de Beauregard. Son premier soin dut être de chercher un gîte : il le trouva dans la paroisse de Beaufou. L'église avait été brûlée ; il n'en restait qu'un coin dans une des chapelles. Le curé était vieux et cassé, ce fut une circonstance favorable, qui lui permit de dissimuler l'importance de sa mission, sous le titre modeste de vicaire du curé. Il s'astraignit à remplir exactement toutes les fonctions d'un simple vicaire.

"Je travaillais donc avec assez de fruit, dit-il, dans mon vicariat de Beaufou et dans toute cette partie du diocèse.

"Quand tout fut bien établi, je crus devoir réunir en synode tout le clergé du diocèse de Luçon, pour y faire publier les ordonnances de Monseigneur de Mercy. Je fixai le lieu de la réunion dans la belle église de Poiré, non loin de laquelle se trouvait un château dont les propriétaires avaient émigré. Je fis part de mon projet à Charette ; il m'offrit des rations pour les chevaux et un dîner vendéen pour les prêtres. Je fis les convocations et fixai le jour et l'heure.

"Soixante prêtres se rendirent à cette cérémonie, qui avait attiré un grand concours de peuple. Je chantai la messe, je prêchai, puis nous nous rendîmes dans la grande salle du château. L'abbé de Charette de la Colinière et moi prîmes nos places : je désignai un promoteur et un secrétaire ; et après avoir fait reconnaître la signature de Mgr de Mercy par tout le synode, je fis lire ses ordonnances. On établit en tête du procès-verbal les noms de tous les assistants.

"Un des articles de ces ordonnances disposait que l'Évêque reconnaissait pour canonique tout ce qui avait été ordonné par ses délégués directs, ou par ceux qui l'avaient été en son nom ; mais qu'aussitôt que l'un de ses anciens grands vicaires serait arrivé dans le diocèse, tous les pouvoirs cesseraient, excepté ceux de ce grand vicaire.

"Cet article passa assez facilement, sauf l'opposition qu'y fit un religieux de la Chancelade, prieur de Sainte-Marie de l'île de Ré, qui se récria beaucoup, ayant eu des pouvoirs directs dès 1792. Mais comme le synode déclara qu'on ne le reconnaissait plus, il céda, non sans mécontentement. Peu après, il adopta un système de dissidence, qu'il a poussé jusqu'à la non admission du Concordat. Il s'est fait depuis, le chef de ce parti, et il a placé son siège à Fontenay-le-Comte, où des femmes assez marquantes s'associèrent à son schisme.

"Il fut fait plusieurs règlements, dont un portait que toutes les fonctions seraient gratuites ; que l'on pourrait seulement recevoir des fidèles des dons modérés. On pria Messieurs les Présidents du synode, de déclarer qu'on n'acceptait pas les contributions que Charette avait fait offrir.

"On régla l'étendue de la juridiction de chaque ecclésiastique, les présidents furent priés de recevoir le prix des dispenses et d'en former un fond pour les nécessités des prêtres et des églises. On rédigea les articles qui durent être remis à chacun de Messieurs les ecclésiastiques."

ARTICLES ARRETES
A L'ASSEMBLEE DU CLERGE TENUE AU POIRÉ.
Le 4 août 1795.

BAPTEMES - On réhabilitera les baptêmes faits par les jureurs et intrus lorsqu'ils seront douteux, et on pourra suppléer les cérémonies sans Saint Chrème.

MESSE - On ne dira plus la messe sur deux corporaux.

MARIAGES - Les mariages faits par les intrus seront réhabilités selon les formes établies, ainsi que ceux faits devant la municipalité. On observera strictement, quant au mariage, l'usage établi par l'Eglise ; c'est à dire que les parties contractantes s'approcheront des sacrements de pénitence et d'Eucharistie.

Il a été arrêté qu'il sera fait des représentations au général en chef de la Vendée, pour pourvoir à la subsistance et au besoin des Religieuses nécessiteuses, ainsi qu'à ceux des ecclésiastiques qui seraient dans le besoin.

Arrêté qu'il sera fait par Messieurs les curés, une liste des religieuses qui seront dans leurs paroisses, laquelle sera envoyée à Messieurs les Vicaires Généraux.

Arrêté qu'il sera fait des recherches au sujet des ornements, livres d'église, calices, et généralement tout ce qui sert au culte de la religion ; que rapport en sera fait aux Vicaires Généraux, afin qu'on puisse en distribuer dans les paroisses qui en manquent.

Messieurs les Curés donneront un état des pauvres et autres nécessiteux qui seront dans leurs paroisses, afin que les Vicaires Généraux, de concert avec les Pasteurs, écrivent aux administrateurs pour avoir des secours en leur faveur.

Arrêté que Messieurs les Curés donneront une liste des diacres et sous-diacres qui sont dans leurs paroisses, afin qu'il leur soit enjoint par les supérieurs ecclésiastiques, d'aider les prêtres dans leurs fonctions ; particulièrement dans celle du catéchisme qu'ils feront sous l'inspection des Pasteurs.

Arrêté que Messieurs les Curés feront passer à Messieurs les Vicaires Généraux, une liste de toutes les dispenses qu'ils ont accordées, en vertu du pouvoir qu'ils ont reçu pendant la persécution du Seigneur évêque, afin qu'il en soit tenu un registre exact, pour être mis sous les yeux du Prélat, lorsqu'il reparaîtra dans son diocèse.

Fait et arrêté au Poiré le 4 août 1795.

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LISTES DE MM. LES PRETRES CATHOLIQUES QUI TRAVAILLENT AU SAINT MINISTERE DANS LES ARRONDISSEMENTS DES ARMEES CATHOLIQUES ET ROYALES DES PAYS BAS ET DU CENTRE DIOCESE DE LUCON.

M. Doussin de Voyer, desservant du Bourg-sous-la-Roche
M. Ténèbres, curé de Croix-de-Vie, dans les marais de Soullans
M. Alexis Mailliet Ribet, curé de Saint-Hilaire le Doyen, diocèse de Poitiers, desservant des Essarts
M. Chabot, curé d'Aubigny
M. Robin, desservant d'Aizenay
M. Legouix, desservant de Sainte-Cécile
M. Blanchard, curé de Belle Noüe
M. Moreau, curé de la Chaize-le-Vicomte
M. Allain, prieur de Saint-André Gouledoie
M. Remaudet, à Pont-de-Vie, paroisse du Poiré
M. Mady, curé de Saint-Denis la Chevasse
M. Renaud, curé de Chavagnes
M. Buet, desservant la Merlatière
M. O'Brien, Irlandais, desservant de Boulogne
M. Audureau, vicaire de Saint-Denis la Chevasse
M. Merland, curé de l'Aiguillon, desservant de Lairière
M. Guédon de la Poupardière, curé de la Rabatelière
M. Guillaudeau, chanoine de Montaigu, desservant les Brouzils
M. Amiaud, vicaire de Saint-Sulpice le Verdon, desservant de Mormaison
M. Barbedette, curé du Grand-Luc
M. Joussebert, curé de Beaufou
M. Moreau, curé du Poiré
M. Gillier, desservant de Legé
M. Sauvage, desservant de Saint-Christophe la Chartreuse
M. Touret, desservant de Saint-Etienne-du-Bois
M. Guyard, prêtre à Chauché
M. Mitrecey, curé de la Grolle
M. Hervouet, vicaire de Bouaîmé
M. Huët, curé de Landevielle à Luçon
M. Voisin, curé de Landeronde
M. Gaboriau, desservant de Treize-Septiers
M. Veillard, desservant de Saint-Etienne-de-Corcoué
M. Duranceau, curé de Sainte-Foy
M. Le Breton, ancien vicaire de Verné, desservant de Saint-Michel-Mont-Mercure
M. de Laveau, curé de Châteaumur
M. Serre, desservant de la Flocellière, missionnaire de Saint-Laurent
M. Paillar, desservant de Saint-Mars, aumônier des religieuses de Cholet
M. Bourcier, desservant d'Ardelay, curé des Moûtiers-sur-le-Lay
M. Bourcier, prieur de Mouchamps
M. Fumoleau, curé de Chavagnes-en-Pareds
M. Vrignaud, desservant du Boupère, vicaire de Cheffois
M. Macé, desservant de Saint-Paul en Pareds
M. Serillé, desservant au Châtelier
M. le frère Julien, capucin de Machecoul, desservant au Petit-Bourg des Herbiers
M. Brilleau, desservant de Saint-Fulgent
M. Cornu, curé de la Barotière
M. Desplobin, curé de Puymaufrais, à Chantonnay
M. Imbert, curé de la Ronde, près la Châtaigneraie
M. Marion, curé de Saint-Jacques-de-Montaigu, à Saint-Georges paroisse de Beaurepaire
M. Anguis, curé de Beaulieu, desservant la Meilleraye
M. Giraud, desservant à Landeronde, vicaire d'Olonne
M. Gauthier, desservant de la Boissière
M. Brennyat, desservant de Bazoges en Paillers
M. Jagueneau, à la Guyonnière
M. de Gruchy, desservant à Venansault
M. de Charette de la Colinière, vicaire général
M. J. Brumauld de Beauregard, vicaire général du diocèse faisant les fonctions de vicaire de Beaufou.

On a vu que le synode avait refusé les contributions que Charette avait offert de lever pour l'entretien du Clergé, mais qu'il avait demandé qu'il fut pourvu à l'entretien des religieuses. Il fut donné satisfaction aux voeux du clergé Vendéen par l'ordonnance suivante :

"Nous, François Athanase Charette de la Contrie, lieutenant-général des armées du Roy, général en chef de la Vendée.

Toujours animé du bonheur public, nous nous sommes appliqué, dans la partie de notre commandement, à diminuer les horreurs de la guerre affreuse et sans exemple, que les ennemis de la Religion et du Trône nous ont livrée. Au milieu des combats nous n'avons pas négligé de pourvoir à la police intérieure. Les individus de toutes les classes étant également l'objet de notre sollicitude, nous n'avons pas oublié les ordres religieux et généralement tous les ecclésiastiques. Nous nous sommes particulièrement occupé de leur sort, par notre règlement du douze octobre de l'année dernière ; les circonstances impérieuses où nous nous sommes trouvés, ne leur permettant pas la libre jouissance des bénéfices et communautés dont ils avaient la possession avant les troubles, nous sommes venus à leur secours d'une autre manière, en les engageant par notre susdit règlement, à faire connaître leur état aux conseils respectifs de leur résidence, et en chargeant nos inspecteurs généraux de leur indiquer comment et où ils doivent recevoir leur moyens de subsistance. Soit que, malgré la publicité donnée à notre règlement, ses dispositions ne soient pas venues à leur connaissance, soit que la continuation des troubles ait apporté obstacle à leur exécution, nous avons appris avec douleur qu'un très petit nombre seulement, s'était présenté et avait pris part aux secours que tous avaient également droit d'attendre. D'un autre côté, considérant que la somme des secours accordés à chacun devenait insuffisante dans l'état actuel des choses, nous avons cru devoir statuer et ordonner ce qui suit relativement aux religieuses dont on nous a fourni la liste, sauf à régler ci-après, les traitements des curés et autres ecclésiastiques qui se trouvent actuellement dans les pays de notre commandement, ce que nous nous proposons de faire d'après les renseignements qui nous seront donnés par Messieurs les Vicaires Généraux.

Article 1er - Il sera payé à chaque religieuse actuellement résidente dans le pays de notre commandement, de quelque Ordre qu'elle soit, une pension annuelle de mille livres, et à chaque soeur attachée audit ordre, celle de sept cents livres ; dont le tiers sera acquitté en bled, à raison de six livres le boisseau de froment du poids de quarante livres, et de quatre livres seize sols le seigle même mesure ; et en bois à feu, selon les besoins de chacune, au prix ordinaire.

Article 2 - Les dites pensions commenceront à courir de ce jour, et seront payées par quartier et toujours d'avance, selon les simples quittances des religieuses et soeurs.

Article 3 - Autant que faire se pourra, ces pensions seront acquitées par le Conseil de la résidence des dits religieuses et soeurs, et en cas d'impossibilité, seront, sur leur réquisition, donné des ordres par les inspecteurs généraux ou particuliers aux conseils les plus prochains et en ayant les facultés, de faire les dits payements, qui ne pourront être retardés sous aucun autre prétexte. Mandons aux chefs de divisions, inspecteurs généraux ou particuliers, de tenir la main à l'exécution du présent, qui sera lu, publié et affiché partout où besoin sera.

Donné en notre quartier général de Belleville, le six septembre mil sept cent quatre-vingt quinze, l'an premier du règne de Louis dix-huit.

Signé : Le chevalier CHARETTE
VERDIGNER, secrétaire

Pour copie conforme à l'expédition que j'ai par devers moi.
BAUDRY, inspecteur général.

Le soussigné certifie l'extrait ci-dessus conforme à l'expédition qui m'a été adressée par M. l'inspecteur général Baudry, à Pont-de-Vie, le 16 septembre 1795.

RENAUD, inspecteur.

Revue du Bas-Poitou - M. Gouttepaguon - 1890 (2ème livraison) - p. 177

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