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La Maraîchine Normande
5 mai 2012

LES CAMPS DE JALES (1790-1792)

Les camps de Jales (1790-1792)

 

Le Comte de Saillans

Les « camps de Jalès » désignent des rassemblements d’hommes en armes dans la plaine de Jalès aux confins des départements de l’Ardèche et du Gard entre 1790 et 1815. Analysés dans leur continuité historique, ils apparaissent comme la mise en place progressive de la Contre-Révolution dans le sud-est de la France.

Les mouvements de défense du catholicisme contre le protestantisme puis contre la Constitution civile du clergé seraient le creuset du mouvement contre-révolutionnaire qui se manifeste clairement lors du troisième camp en 1792 (conspiration de Saillans), puis en 1795, en 1815, et de manière générale au cours du XIXe siècle.

 

Le premier camp intervient le 18 août 1790 et réunit plus de vingt mille hommes, des gardes nationaux et des représentants des municipalités du Gard, de la Lozère et de l’Ardèche. Organisé principalement par Louis-Bastide de Malbosc, maire de Bérias, commune où se situe la plaine de Jalès, ce rassemblement visait à un grand regroupement des forces catholiques destiné à impressionner les protestants à un moment où les massacres de Nîmes avaient ravivé les querelles religieuses.

Condamnés par le département de l’Ardèche puis par l’Assemblée nationale, les responsables de ce premier camp continuent cependant leurs activités et cherchent à rendre pérenne l’organisation d’un comité de Jalès. Celui-ci participe à la mise en place de ce que l’on appelle le « deuxième camp de Jalès » qui consiste en une réaction armée aux « échauffourées d’Uzès » qui avaient mis aux prises protestants et catholiques les 13 et 14 février 1791. Une centaine de catholiques d’Uzès se réfugient dans les villages des alentours de Jalès. Des gardes nationaux s’organisent pour créer un cordon militaire destiné à les défendre de prétendues menées protestantes. La plaine de Jalès apparaît comme le point de rendez-vous central d’environ dix mille hommes, mais, suite à l’interdiction du camp prononcée par le directoire du département, les membres du comité ne se montrent pas. La désorganisation est totale. Lorsque les troupes du Gard arrivent pour disperser le rassemblement, elles ne trouvent, le 22 février, que quelques traînards.

 

Le troisième camp se tient plus d’un an après, en juillet 1792. Dans l’intervalle, les tensions se sont accrues des tentatives d’application de la Constitution civile du clergé, des problèmes financiers des administrations et de la situation de crise économique. Au printemps 1792, le Vivarais et le Gard connaissent les violences de la « guerre des châteaux » qui contribue à renforcer la peur puis la colère des opposants au nouveau régime. En juillet, le comte de Saillans déclenche une opération militaire destinée à allumer le foyer de la Contre-Révolution dans le Midi. Cette tentative insurrectionnelle, préparée par les émigrés de Coblence et les successeurs du comité de Jalès, tourne court : déclenchée malgré les instructions des émigrés, ne parvenant pas à obtenir les soutiens populaires qu’elle escomptait, l’entreprise réunit environ dix mille hommes qui s’emparent du château de Bannes, mais se dispersent vite sous la pression des forces patriotes. L’échec de l’insurrection entraîne une répression marquée par des violences.

Le 18 août au matin, entre vingt et quarante-cinq mille hommes se retrouvent dans la plaine de Jalès, maires, officiers municipaux et surtout gardes nationaux venus avec leurs insignes et drapeaux. Le procès-verbal rédigé à l’issue de la journée par le comité fédératif de Jalès indique que l’armée s’est rangée en ordre de bataille dans une « harmonie vraiment patriotique » pour adresser ses vœux à l’Être suprême et entendre la messe. Tous prêtent ensuite le serment d’être fidèle à la Nation, à la Loi et au Roi, de maintenir la Constitution établie par l’Assemblée nationale, de protéger conformément aux lois la sûreté des personnes et des propriétés, la libre circulation des grains et des subsistances, de demeurer unis à tous les Français par les liens indissolubles de la fraternité . Jusque là, rien ne distingue ce rassemblement d’une fédération normale : les corps constitués ont approuvé la réunion, le discours du général du camp a appelé à la « confraternité », le serment ne mentionne pas la religion. L’état-major de la fédération se retire ensuite dans le château avec certains représentants des gardes nationales et des municipalités. Le comité de Jalès, au nom de la fédération, vote six résolutions qui concernent les affaires de Nîmes et confèrent au camp une orientation de défense du catholicisme qu’il n’avait pas prise jusque là. Enfin, le comité se déclare permanent pour constituer le lien de l’armée fédérative ainsi qu’un centre de pétitions et de conciliation.

Le vote des six résolutions sur l’affaire de Nîmes est clairement dicté par des considérations religieuses, mais il intervient après qu’une grande partie des hommes sont partis et ne réunit que ceux qui ont effectivement vu le camp comme un rassemblement de défense des catholiques menacés. Les résolutions votées ne sauraient représenter l’opinion des milliers de participants comme voudrait le faire croire au comité. D’ailleurs, de nombreuses lettres et arrêtés de municipalités ou des gardes nationales présentes le 18 août improuvent très rapidement les décisions prises à la fin de la journée.

La parution au mois d’octobre 1790 d’un texte intitulé « Manifeste et Protestation de cinquante mille Français fidèles, armés dans le Vivarais pour la cause de la Religion et de la Monarchie contre les usurpations de l’Assemblée se disant nationale » contribue à faciliter l’équation entre la défense du catholicisme et la Contre-Révolution et à faire glisser le camp de Jalès dans cette dernière.

 

 

Claude Allier, curé de Chambonas, est devenu l’âme de la Contre-Révolution et le nouvel animateur du réseau issu du comité de Jalès. En février 1792, il se rend à Coblence pour soumettre aux Princes un plan de soulèvement. Dès le 4 mars, les émigrés nomment Conway pour prendre la tête de l’armée du Midi et lui adjoignent le comte de Saillans qui connaît bien le pays. Sur l’incitation de Claude Allier qui l’assure pouvoir réunir immédiatement une armée de quinze à vingt-cinq mille hommes, Saillans, impatient d’agir, refuse de se soumettre aux injonctions de Conway puis des Princes eux-mêmes et déclenche l’insurrection avec l’accord du comité de Jalès. Dès le 4 juillet, il entreprend le siège du fort de Bannes avec les mille cinq cents hommes déjà regroupés à Saint-André de Cruzières par Claude Allier. La citadelle capitule le 8 juillet : Saillans est maître de la plaine de Jalès et des communes avoisinantes, il multiplie les proclamations, fait sonner le tocsin pour appeler les paroisses voisines à le rejoindre, mais est vite obligé de reconnaître que ces appels n’ont aucun succès. De fait, le comte n’arrive à maintenir péniblement qu’une troupe de mille cinq cents à mille six cents hommes. En face, les départements de l’Ardèche et du Gard ont réussi à en mobiliser près de dix mille.

 

La répression est menée, à partir du 11 juillet, conjointement par les forces de l’Ardèche et celles du Gard. La seule véritable bataille se déroule sur la montagne de Saint-Brès : les révoltés parviennent à maintenir leur position durant trois heures et l’emploi de l’artillerie est nécessaire pour les déloger. Alors que les forces patriotes ne comptent aucune victime, les hommes de Saillans qui sont rattrapés durant leur fuite sont massacrés. Le village de Saint-André, déserté par ses habitants, est entièrement brûlé par l’armée patriote.

 

 

Le 11 au soir, Saillans ne tient plus que le château de Bannes et les hameaux qui l’entourent. Le messager qu’il envoie à l’armée de Saint-Ambroix est massacré par les patriotes. Dans la nuit du 11 au 12 juillet, Saillans et ses hommes s’enfuient. Dès lors, les troupes s’attachent à retrouver les fuyards et tuent tous ceux qu’ils trouvent sans qu’il soit possible de déterminer le nombre des victimes. Le Comte de Saillans lui-même est arrêté alors qu’il tente de passer en Lozère avec quatre de ses hommes. Ils sont conduits aux Vans par la troupe qui les a arrêtés, renforcée par les gardes nationaux des villages qu’ils traversent et de simples particuliers 46. Aux Vans, la foule attend sur la place de Grave. Accueillis par des injures et des coups, les prisonniers, malgré les efforts déployés par les autorités, sont décapités. Les têtes sont promenées en ville sur des piques au chant du « ça ira ». La tête de Saillans fera même le chemin jusqu’à Largentière. D’autres prisonniers connaissent le même sort dans les jours qui suivent et selon le même rituel. Cette répression populaire ne concerne pas uniquement les complices avérés de Saillans. Ainsi, neuf prêtres arrêtés à Naves, mais dont on n’avait aucune preuve de la culpabilité, sont massacrés aux Vans le 14 juillet.

 

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