La poudrerie de Grenelle
La poudrerie de Grenelle
le 31 août 1794
La France vient alors de trancher la tête à son roi, sort à peine de la Terreur, se débat dans les guerres révolutionnaires. Dans les arsenaux de la République, l’heure est au productivisme : il faut sans cesse livrer plus de poudre et de balles pour percer les poitrines chouannes ou étrangères.
Dans la poudrerie de Grenelle - située dans l’actuel XVe arrondissement de Paris - créée par la Convention , 2000 ouvriers s’entassent, mélangeant salpêtre, soufre et charbon pour les armées du peuple. Jean-Antoine Chaptal en a pris la direction quelques mois plus tôt et a imposé une augmentation des cadences. Son objectif : passer au plus vite d’une production quotidienne de 8000 livres à 35.000 livres.Dans les ateliers, l’atmosphère est étouffante, la promiscuité est oppressante et les normes de sécurité sont inexistantes.
Vers 7 heures du matin, les dizaines de tonnes de mélange déflagrant stockées dans le magasin de poudre du Château de Grenelle explosent alors que Paris s’affaire déjà.
Malveillance ou négligence ? Il n’aura en tout cas suffi que d’une étincelle pour causer la première tragédie industrielle en France. La déflagration, immense, réveille tous les Parisiens qui dormaient encore fait sursauter les lève-tôt. Elle est entendue jusqu’à Fontainebleau. Autour du château, les arbres sont sectionnés, les habitations sont ravagées. 1000 personnes, pour la plupart des ouvriers de la poudrerie, trouvent la mort. Les hôpitaux de la Charité et du Gros-Caillou sont débordés face à l’afflux de blessés.
L’élan de solidarité des Parisiens sera par la suite à la mesure de l’émotion : immense. Les maisons sont vite reconstruites par des bénévoles. Surtout, l’indignation de l’opinion et la prise de conscience des risques liés à la modernité sont considérées comme à l’origine du décret impérial de 1810 sur les établissements dangereux, insalubres et incommodes. Une législation qui sera par la suite aménagée et dévoyée, au nom des sacro-saints «intérêts supérieurs de la Nation».