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La Maraîchine Normande
10 avril 2012

SAINT-ANDRÉ-D'ORNAY (85) - ABBAYE DES FONTENELLES - Déclaration du Prieur Mornac

FONTENELLES

 

A nos Seigneurs des Etats-Généraux

 

Les chanoines réguliers de l'abbaye des Fontenelles voulant donner des preuves de leur patriotisme, vous supplient de prendre en considération qu'ils voient avec douleur la ruine prochaine d'une maison qu'ils chérissent, que le public regrette et dont les avantages que l'Etat compte en retirer n'équivaudront jamais à la perte que toutes les paroisses circonvoisines jusqu'ici au service de son église une affluence de peuple assez considérable pour prouver la nécessité de le continuer. Une solitude agréable, un air doux et bienfaisant, des habitants tranquilles, laborieux et attachés à la région ; un ruisseau, des fontaines et surtout une eau minérale très salutaire et fort fréquentée ; une belle église, une maison presque entièrement réparée, d'un bon goût et susceptible de la forme la plus convenable pour y fixer un établissement public : que de pertes d'avantages précieux dont il est si difficile de rassembler toutes les parties, quand on veut faire le bien en faveur d'un canton ! Le local est tellement situé qu'en cas qu'il soit vendu, cette église et les bâtiments, dont les matériaux seroient d'un grand prix près d'une ville, vont tomber en non-valeur. La démolition et les déblais de l'église seroient immenses pour un acquéreur. Quel avantage auroit-il à la conserver ? L'entretien lui tomberoit en dépenses inutiles.

 

Messieurs les députés des provinces, avec la meilleure volonté du monde, ne connaissent point assez particulièrement tous les endroits de leurs cantons pour y opérer tout le bien possible. Ils ont besoin d'être éclairés par quelqu'un sur les lieux, qui, réfléchissant profondément sur les objets qui sont sous ses yeux, les mettroit à même de proposer à la bienfaisance des États les établissements les plus intéressants à faire. Il en est un, dans le moment présent où les districts se fixent, qui paraît digne de la plus avantageuse considération pour la partie du Bas-Poitou qui avoisine la Roche-sur-Yon, où sans doute il va s'en former un. La plupart des endroits où les Etats en ont établi ont quelque établissement populaire, soit atelier de charité, soit hôpital. Quel canton que celui des environs de la Roche-sur-Yon a plus besoin de ce dernier ? A en juger seulement par le nombre des malades pauvres qui viennent journellement chercher du soulagement à l'abbaye des Fontenelles, il n'y a personne qui ne convienne que le meilleur usage à faire des biens de cette abbaye et de ses bâtiments, est de les consacrer à cette pieuse régénération. Ce sont les seigneurs de la Roche-sur-Yon qui l'ont fondée ; elle en est dans un tel éloignement que, sans avoir l'incommodité de trop de voisinage, elle y pourroit aisément faire descendre les malades. Les administrateurs, qui feroient leur séjour à la ville ou aux environs, n'auroient pas loin à s'y rendre pour y conférer en bureau. Les terres donneroient du blé, du vin, des bois suffisamment ; les chanoines réguliers continueroient de servir l'autel et les pauvres, et partageroient, avec tout le canton, le bienfait incomparable de cet établissement, dont l'époque seroit à jamais gravée dans les coeurs.

En l'abbaye des Fontenelles le douze février mil sept cent quatre-vingt dix.

MORNAC, Prieur

 

Cette déclaration est contresignée et adressée à l'Assemblée nationale par le maire de Saint-André-d'Ornay, Grelier ; le procureur de la commune, Baritaud, curé, et le greffier, Joseph Renaudin, à la date du 21 février 1790.

(Le Pouillé de l'Evêché de Luçon, par Aillery, désigne comme abbé des Fontenelles, en 1789, De Fresne, doyen du Chapître de Luçon, député du clergé pour l'élection des Sables à l'Assemblée tenue à Poitiers. La nomination de De Fresne remontait à l'année 1787)

Que sont devenus les objets mobiliers et les livres qui se trouvaient encore aux Fontenelles en 1790 ? Trois années à peine allaient s'écouler, et la pauvre abbaye, déjà bien éprouvée, se voyait livrée à toutes les horreurs de la guerre civile, qui ne pouvait guère contribuer à la relever.

Le 9 septembre 1793, la Commission militaire des Sables-d'Olonne, dont les délibérations sont conservées aux archives du département, renvoyait devant le tribunal criminel, pour "avoir fait partie d'un attroupement, arboré la cocarde tricolore et monté la garde avec les rebelles, Louis-François-Avril Demonceau, âgé de 65 ans, ci-devant minoré et chanoine régulier de la Congrégation de France, aux Fontenelles".

Quant à son dernier prieur de Mornac, nous lisons dans les Notes et croquis sur la Vendée, publiés par E. de Monbail, en 1843 (Niort, Robin, in-4°), "qu'il fut pris par les républicains, qui lui coupèrent le nez et les oreilles et le laissèrent dans le couvent auquel ils avaient mis le feu. Les paysans, inquiets de son sort, vinrent le secourir. Il n'eut que la force de se faire porter dans l'église, où il mourut presque aussitôt au milieu des plus horribles souffrances."

 Ce jour-là, l'abbaye des Fontenelles avait bien cessé de vivre.

 

FONTENELLES 3

E. L. - Société d'émulation de la Vendée - 1897

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