PANGE (57) - LES FRÈRES THOMAS DE PANGE SOUS LA RÉVOLUTION
Qui sont les Thomas de Pange à la veille de la Révolution ? Une des plus opulentes familles de Lorraine, une famille de noblesse de robe relativement récente - 1626 - enrichie par la finance dans la première moitié du XVIIIe siècle grâce à l'achat de charges lucratives : celle de Trésorier général de l'extraordinaire des guerres à Metz, transmise par deux générations et évaluée en 1780 à 1 million de livres, de Trésorier général de l'Ordre militaire de Saint-Louis, qui permettent à la famille, intéressée aux finances du royaume, de profiter de la confusion quasi générale à cette époque établie entre fortunes privées et publiques.
L'achat de la terre de Pange en 1720, la construction à Pange, en 1756, sur l'ancienne motte féodale, d'un vaste château de style classique par l'architecte Jean-Baptiste Louis, l'un des meilleurs de son temps, l'acquisition de l'ancien hôtel de La Force, rue Vieille du Temple à Paris, consacrent peu à peu, au cours du XVIIIème siècle, la réussite de la famille.
En 1766, la terre de Pange est érigée en marquisat par Stanislas, dernier duc de Lorraine.
Les titres et les charges du dernier marquis de Pange vivant avant la Révolution montrent clairement le rang qu'occupait la famille à la fin du XVIIIe siècle. Jean-Baptiste Thomas, marquis de Pange, comte de Châteauneuf et Saint-Gervais, baron de Chapelaine, seigneur de Domangeville, Villers-Lacquenexy et autres lieux, possède également depuis 1774, la charge de Grand Bailli d'Épée de la ville de Metz, l'une des grandes charges honorifiques des Évêchés de la fin du XVIIIe siècle.
A sa mort, en 1780, Jean-Baptiste laisse cinq enfants. De son premier mariage, en 1751, avec Marie d'Arbouville, une fille Marie-Louise, comtesse de Bercheny en 1769. De son second mariage, en 1754 avec Marie d'Espinoy, une fille, Françoise, marquise de Saint-Simon en 1773, et trois fils, LOUIS qui épousera en 1784 Mlle de Valicourt, nièce du comte de Calonne, surintendant des finances du royaume, FRANÇOIS et JACQUES, encore célibataires lorsqu'éclate la Révolution.
Par le jeu des alliances matrimoniales, les Thomas de Pange se retrouvent donc alliés à la fin du XVIIIe siècle avec plusieurs grandes familles de cour : les Montmorin, les Saint-Simon, les Calonne. De plus, leur train de vie se rapproche plus de celui des grandes familles de cour parisienne que des familles de la noblesse provinciale. Un seul exemple significatif : Jean-Baptiste possède en 1770 une collection de peintures italiennes réputée dans la capitale et de plus, fait peintre ses deux fils aînés par Greuze et Jean-Hubert Drouais, tous deux membres de l'Académie royale de peinture. Aussi, il n'est pas surprenant que les enfants de Jean-Baptiste aient été destinés tout naturellement à la carrière des armes, la seule envisageable dans le contexte de l'époque parmi les grandes familles de la noblesse de cour. De toute façon tout aussi logique, les deux aînés, Louis et François, connaissent des promotions rapides, sans comparaisons avec celles des fils de la noblesse provinciale.
Après avoir brillamment participé à la guerre d'Indépendance américaine comme aide de camp du baron de Vioménil, en 1780 - 1782, LOUIS obtient en 1785, à l'âge de 22 ans, le grade de colonel en second du Régiment de Bercheny-Hussards, sous les ordres de son beau-frère, colonel propriétaire du régiment et grâce à la protection du comte de Calonne, son oncle par alliance. Les services rendus à la bataille de Yorktown n'expliquent donc pas seuls une promotion aussi rapide. La même année, son frère cadet Jacques est reçu dans la compagnie des gendarmes de la garde, sous les ordres du prince de Rohan-Guéménée. Il n'a que 15 ans. 4 ans plus tard, il remplace son frère François, plus porté vers les lettres que vers les armes, comme capitaine de remplacement au régiment de Bercheny-Hussards, décidément le régiment de la famille !
En 1780, d'après un tableau des biens de la succession de Jean-Baptiste, celle-ci est évaluée à 4.039.000 livres de capital, d'un rapport de 103.234 livres de rentes annuelles.
En 1789, la succession de Jean-Baptiste n'est toujours pas réglée. LOUIS, légataire universel de Jean-Baptiste, ne contribue pas à arranger les choses. Très mauvais gestionnaire, dépensier, la fortune familiale se dégrade rapidement entre ses mains. Deux mesures préventives sont successivement prises à son égard. En 1784, une substitution d'1.000.000 de livres en faveur de ses enfants à venir est instituée à l'occasion de son mariage avec Mlle de Valicourt. En mai 1788, il est carrément frappé d'interdiction "afin, d'après la sentence, de mettre un terme à quelques dissipations qui tiennent plutôt de l'inexpérience de son âge qu'à son véritable caractère". Comme ces choses-là sont élégamment dites. En termes plus concrets, la succession est au bord de la faillite.
En septembre 1790, Louis obtient la mainlevée de son interdiction à la chambre du conseil du Châtelet de Paris. Il consent à ce que la substitution dont il a été grevé à son contrat de mariage soit assise sur le marquisat et les bois de Pange, sur le capital de ses rentes sur le roi ; à ce qu'il soit procédé par ailleurs à la vente judiciaire de ses autres biens au profit de ses propres créanciers et des héritiers légitimaires de la famille.
Au début de la Révolution, la fortune familiale est donc déjà sérieusement écornée. Les mesures prises par la Convention, en 1793, ne font qu'accélérer les choses.
Le 13 avril 1793, l'inscription de Louis, qui depuis le mois de mai 1791 a rejoint l'armée des princes avec son régiment, sur la liste des émigrés, entraîne la saisie de l'ensemble des biens de la famille, puis leur vente.
Marie-Louis est né à Paris, paroisse Saint-Jean-en-Grève, le 17 mai 1763.
Il fut reçu tout jeune dans la Maison-Rouge du roi, compagnie des gendarmes de la garde, commandée par le maréchal de Soubise.
A la mort de son père (1780), il était en Amérique comme aide-de-camp de M. de Viomesnil, son parent.
En 1785, il fut nommé colonel en second des hussards du comte de Bercheny, son beau-frère. Il émigra et fut colonel en second de la légion de Mirabeau ; puis le régiment de Bercheny ayant émigré, il y reprit, à la solde de l'Autriche, son grade de colonel en second, et fut cité à l'ordre du jour de l'armée de Clerfayt.
Il revint en France en 1793 et parvint à se joindre aux Vendéens. Il lutta avec eux en tant que commandant de cavalerie. Il fit la Virée de Galerne mais fut séparé de l'armée à la bataille du Mans en décembre 1793. Il poursuivit alors le combat avec les Chouans sous les ordres de Monsieur de Scépeaux qui le fit officier général.
Nous trouvons, dans le "Libre des rapports" de M. de Chateaubriand (puisaye papers, vol. XXVI), le récit d'un engagement dans lequel il reçut une de ces blessures qui lui avaient coûté la santé. Il eut ce jour-là deux doigts emportés d'un coup de fusil.
Les états de service du marquis de Pange nous apprennent qu' "il fut tué, étant maréchal de camp, commandant la cavalerie de l'armée royale." Ce commandement lui avait été confié par le conseil général de l'armée de Bretagne, le 11 décembre 1795.
M. de Pange mourut, le 19 janvier 1796, sur le territoire de la commune du Pin, arrondissement d'Ancenis.
Il avait épousé à Paris, paroisse Saint-Sulpice, le 24 août 1784, Marie-Charlotte de Valicourt, née à Douai, paroisse Saint-Pierre, le 11 juillet 1757. Elle était fille de Maximilien-Marie de Valicourt, écuyer, seigneur de Vitremont, Mesnil et Beaucourt, échevin de Douai en 1753 et 1759, et de Marie-Madeleine-Joseph de Calonne.
Né à Paris le 9 novembre 1764, le chevalier de Pange, Marie-François-Denis, se trouve à seize ans, après le décès de ses parents, maître de lui-même. "Il achève de fortes et solides études qui en firent un écrivain et qui en auraient fait un historien s'il eût vécu".
Dans les "Poésies" d'André Chénier on retrouve fréquemment le nom du chevalier de Pange qui faisait, avec Marie-Joseph Chénier, le marquis de Brazois et les deux frères Trudaine, partie de ce petit cénacle de 1787 où le Brun dominait de sa gloire et encourageait de ses conseils les essais et les projets de ce groupe fraternel, voué par son goût de la liberté et son culte de la raison à la lutte inégale des politiques de principe contre les politiques de fait, des libéraux constitutionnels contre la tyrannie démagogique et anarchique, et à cet échafaud de la Terreur devenu le suprême argument d'incapables et implacables adversaires. Partout, dans les vers d'André, on retrouve la trace de ce prestige du jeune sage, de ce qui préférait la philosophie à la poésie et sentait moins la joie que la tristesse de la vérité. "Triste comme la vérité". Ce mot frappant est celui de ce jeune homme stoïque et pensif qui avait su si bien faire apprécier au poète : "L'amicale douceur de ses chers entretiens. Son honnête candeur, sa modeste science, de son coeur presque enfant la mûre expérience".
Membre, avec André Chénier et Condorcet, de la Société de 1789 ou des "Amis de la Constitution", puis du club des Feuillants, François de Pange, qui préférait se taire que parler et n'avait ni l'ardeur ni la santé nécessaires à l'orateur, demeura silencieux. Mais quand le journal devint l'unique tribune des modérés, il se servit de sa plume comme d'une arme désespérée, non sans honneur pour son opinion et sans blessures pour ses contradicteurs. Le rédacteur du "Journal de la Société de 89", qui dura peu, défendit pied à pied au "Journal de Paris", à côté de Suard, de Regnault de Saint-Jean d'Angély, de Morellet, de Charles Lacrételle, de François Chéron, le terrain de plus en plus étroit de la liberté légale.
On peut lire encore avec une curiosité qui n'est ni sans attrait ni sans profit, ses premiers opuscules, sa brochure sur la "Sanction royale et ses Observations" sur la loi relative "aux délits qui peuvent se commettre par la voie de la presse". Dans ces deux morceaux, nous trouvons de Pange encore en proie à l'enivrement de la victoire, à l'enthousiasme de la logique et aux illusions de l'absolu, portant avec une noble confiance le joug de ses deux maîtres Condorcet et Siéyès. Il est optimiste comme le premier, il est tranchant comme le second. Mais la lutte assouplit bientôt cette raideur mathématique, et l'expérience ne tarde point à le dégoûter des raisonnements poussés jusqu'à l'absurde. Il refusait fièrement au roi "le veto" comme une atteinte à la souveraineté nationale. Il s'élevait contre la prétention du législateur de toucher à l'inviolabilité de la pensée.
Il a quelque peu modifié en 1792 ces opinions trop absolues, et il est revenu de sa crédulité aux généreuses chimères, quand il a vu le pouvoir exécutif successivement annulé, puis usurpé, tomber de chute en chute du despotisme de l'Assemblée au despotisme des assemblées, du Parlement aux clubs, et de la tribune à la rue, quand il a vu surtout le droit de contradiction et le droit de réponse déshonorés ou étouffés tout à tour par la licence et par la violence. Alors le chevalier de Pange s'est rendu compte de cette double vérité que ses amis devaient payer si cher : c'est que toute révolution, quelque légitime que soit son principe, tend toujours fatalement à se corrompre dans les faits ; c'est que ceux qui ont fait une révolution sont impuissants à la diriger ou à l'arrêter, par suite de la disproportion toujours plus grande entre l'influence des principes et celle des passions, entre l'activité des philosophes qui ont tout prévu et celle des démagogues qui osent tout.
C'est ce noble désespoir de l'esprit vaincu par les faits, cette pudeur indignée de la raison impuissante qui écartèrent, après le 10 août, le chevalier de Pange de l'arène envahie par la multitude, et où, si le danger l'attirait encore, il se sentait dégoûté de lutter par le mépris. Enseveli dans la retraite, il attend que la tempête ait passé, que les forces aveugles de la destruction, déchaînées par l'ambition des courtisans de popularité, aient achever leur oeuvre fatale.
D'une famille opulente, il a une vie facile, libre de tous soucis, qui lui permet de se consacrer aux lettres et de se lancer, à cette époque de crise sociale, dans l'étude des systèmes démocratiques avec des idées nouvelles et hardies. Il se fait de nombreux amis, mais également des ennemis ; aussi reste-t-il dans l'ombre pendant la Terreur.
En avril 1794, François, dénoncé comme suspect et contraint de fuir, avait gagné la Suisse ; il s'était établi à La Neuveville et y avait ouvert une imprimerie.
Quand vient Thermidor, il se lève à la première lueur de l'astre libérateur. Mais il se lève à jamais pâli et fatigué, portant le deuil de tous ses amis, André Chénier, les deux Trudaines, M. de Montmorin, Bailly, Roucher, les Loménie, les d'Etigny, les Sérilly, tous tombés sous le sanglant niveau.
Frappé aux sources de la vie par les douleurs de l'esprit et les regrets du coeur, c'est en vain qu'il cherche à se reprendre à la vie, à l'espérance, au travail, au bonheur. C'est en vain qu'il épouse, en 1795, la femme qu'il aime, cette Mme Megret de Sérilly, sa cousine (Anne-Marie-Louise Thomas de Domangeville), condamnée à mort le 21 floréal an II avec son mari, échappée à la faveur d'un sursis fondé sur sa grossesse, sauvée par Thermidor, et qu'on avait vue non sans un murmure d'horreur et de pitié, appelée en témoignage dans le procès de Fouquier-Tinville, s'avancer devant le tribunal, tenant à la main son extrait mortuaire dressé par les huissiers qui n'avaient pas prévu le sursis et n'en avaient pas tenu compte.
Triste mariage, au reste ! François de Pange était déjà malade, très malade, épuisé. Mme de Pange ne fut guère qu'une garde attentive auprès d'un mari qu'elle voyait lentement s'éteindre entre ses bras. Le 27 messidor an IV (15 juillet 1796), après plusieurs semaines d'agonie, François de Pange mourait dans son château de Passy-sur-Yonne, à l'âge de 31 ans, (château où un peu plus de deux ans auparavant Antoine de Sérilly avait été arrêté, puis conduit à la guillotine), sans avoir pu réaliser l'oeuvre vraiment marquante que ses qualités laissaient présager.
Il fut aimé à la fois de la séduisante Mme de Sérilly, de la tendre Pauline de Beaumont, de l'ardente Mme de Staël et de la fine marquise de Pastoret.
Bulletin de la Société historique et archéologique de Langres - 1er avril 1962 / Journal parisien Candide - 21 mai 1925 / Gallica - Fichier Bossu / Journal La Presse du 16 mai 1873 / Grandeur et misère de Benjamin Constant par Charles du Bos - 1946 / Vendéens et Républicains dans la Guerre de Vendée par Frédéric Augris - Tome II - 1993 / Portrait : Madame de Staël et François de Pange par la comtesse Jean de Pange - 1925 (Numilog.com).
Marie-Jacques est né à Paris, paroisse Saint-Gervais, le 29 août 1770.
Jacques est sans doute le plus intéressant des trois frères Pange, le pragmatique de la famille, le seul à survivre à la Révolution. Par sa naissance, il appartient sans conteste à l'"Ancienne France", selon une dénomination courante à partir de 1800. Par ses engagements sous le Consulat et l'Empire, il se lie progressivement à la "Nouvelle France" issue de la Révolution.
S'il émigre à deux reprises, en 1792 et 1793-1794, et participe à la campagne de Champagne en 1792, de Hollande en 1794, ses relations, en particulier Joseph-Marie Chénier, le frère d'André, lui-même très proche des Pange, et Jean-Victor Colchen nommé préfet de la Moselle en 1800, lui permettent d'obtenir rapidement sa radiation provisoire (1796), puis définitive (février 1799) de la liste des émigrés.
En mars 1803, il est nommé conseiller général de la Moselle pour le canton de Pange. Bien noté par le nouveau préfet, le comte de Vaublanc, futur ministre de l'Intérieur de la Restauration, lié par plusieurs de ses amis à la nouvelle cour, il se rallie sans difficultés à l'Empire.
A l'image de ceux de plusieurs membres de l'ancienne noblesse lorraine : les d'Haussonville, les Beauvau, les Choiseul, particulièrement à l'aise à partir de 1811, lorsque Napoléon se remarie avec Marie-Louise, son parcours est significatif et mêle les honneurs au service.
Nommé Chambellan de Napoléon Ier en 1809, il reçoit, à ce titre, Marie-Louise, à son retour de Dresde, dans son château de Pange, en juillet 1812, et accepte la même année de reprendre du service comme colonel commandant la Garde d'honneur de la ville de Metz, puis comme colonel major du second régiment des Gardes d'honneur en avril 1813. Il participe aux batailles de Leipzig et de Hanau, puis au siège de Mayence où il commande la cavalerie.
Entre temps, il est fait comte d'Empire, par lettres patentes du 22 octobre 1810, un anoblissement qui apparaît plus, comme beaucoup d'autres, comme le gage de son ralliement que comme une récompense de ses services.
En mai 1814, il se rallie à Louis XVIII, et, grâce à l'intervention de son beau-frère, le marquis de Saint-Simon, obtient une lieutenance dans les Gardes du corps du roi en juillet et le grade de maréchal de camp en août.
Alors qu'il était sur le point de rejoindre l'armée impériale, la défaite de Waterloo lui permet de sauver les apparences, mais ne l'empêche pas de connaître une semi-disgrâce. Malgré sa demande de servir dans le département de la Moselle ou dans celui de la Meurthe, il est nommé en août 1815 commandant en chef du département du Gard, à l'autre bout de la France.
Sa fidélité à la politique dite de "juste-milieu", conduite par Decazes, l'efficacité avec laquelle il réprime en juillet 1816 et août 1818, les débordements suscités par les chefs ultra-royalistes du Gard, son amitié pour le comte d'Agout, préfet du Gard et proche de Decazes, lui valent d'être nommé pair de France par Louis XVIII le 5 mars 1819. C'est enfin cette même fidélité qui le conduit à se rallier à Louis-Philippe en août 1830 et à conserver, à la demande de la population, le commandement en chef des départements de la Meuse et des Vosges où il a été nommé en 1821.
Entre temps, Jacques de Pange s'est marié, le 16 août 1809, avec Élisabeth de Caraman, fille d'une princesse de Chimay, descendante de Pierre-Paul Riquet, le fondateur du canal des Deux-Mers.
Par ses propres alliances, par celles de sa femme, il appartient, sous la Restauration, à l'élite aristocratique de son temps. Un seul exemple suffit à le montrer : le nombre des membres de sa famille siégeant à ses côtés à la chambre des pairs. Le cousin germain de sa nièce, Françoise de Rouvroy de Saint-Simon, fille de sa soeur aînée, Henri de Rouvroy est fait pair de France en même temps que lui. Le frère aîné de son beau-père, Victor, comte, marquis puis duc de Caraman, ambassadeur à Vienne depuis 1816, très proche du duc de Richelieu, alors président du Conseil, siège également à la chambre des pairs depuis 1816. Son beau-frère, Maurice de Caraman, maréchal de camp et inspecteur général de cavalerie y entrera en novembre 1827. Le groupe familial s'enrichira encore sous la Monarchie de Juillet. Le futur beau-père de son fils aîné, Georges Mouton, comte de Lobau, nommé maréchal de France par Louis-Philippe, y entre en 1833 ; le mari de sa troisième fille, Armand-Charles de Fay, comte de La Tour-Maubourg, le 20 juillet 1841.
Dans les années 1840, Jacques de Pange reçoit de nombreuses distinctions, et préside plusieurs sociétés locales, signe de son influence dans la région. En 1845, il crée le Comice agricole de Metz et, en 1847, le reçoit dans la cour de son château. Par ailleurs, il préside à partir de 1825 l'Académie des Sciences de Nancy et se fait recevoir comme membre associé à celle de Metz en 1837. On le retrouve également membre honoraire de la Société agricole du Grand Duché de Luxembourg et membre de la Société hippique des haras de Rosières comme propriétaire de chevaux fins. C'est dans le cadre de cette dernière société qu'il propose d'ailleurs, dès 1829, d'aménager un hippodrome à Nancy, à l'emplacement de la promenade de la Pépinière, non loin de la place Stanislas.
Dès le début de l'Empire, Jacques de Pange s'impose ainsi comme l'un des propriétaires les plus influents de son département. En 1811, dans un rapport au ministre de l'Intérieur, le comte de Vaublanc, préfet de la Moselle, lui attribue déjà 40.000 francs de rentes, ce qui est un peu surévalué - soit le 3e revenu du département, et le qualifie de "grand propriétaire s'occupant avec succès d'agriculture et de l'amélioration des troupeaux, faisant beaucoup de bien dans sa terre. Il joint dans le département d'une considération méritée". De même, en mai 1815, le baron Gérard, qui commande les troupes impériales à Metz, le considère à juste titre, "par sa fortune" comme l' "un des premiers de ce pays".
Il est créé pair de France le 5 mars 1819 et président du collège électoral du Gard en 1820. En 1823, il est employé dans la 3e division militaire. Il est admis à la retraite le 12 avril 1848.
Chevalier de Saint-Louis, 1814.
Chevalier de la Légion d'honneur le 28 novembre 1813
Officier, le 18 mai 1820
Commandeur, le 1er mai 1821
Grand Officier, le 30 mai 1837.
Il est décédé le 5 octobre 1850 au château de Pange.
Emmanuel de Waresquiel - extrait - Les Cahiers Lorrains du 1er mars 1991 + portrait / Gallica - Fichier Bossu / AN-Base Leonore - LH//2042/35 /